Lorsque pour la première fois mon ami m’a parlé du livre « The Artist’s Way », je me suis gentiment moquée.
« Comment un livre est-il censé me rendre créative ? Et tout d’abord, je n’ai pas particulièrement envie d’être créative. Ce n’est pas mon genre. Ce dont j’ai besoin, ce n’est pas de créativité, mais de motivation et de force de volonté. Tu n’aurais pas un livre sur ça par hasard ?
– Commence et tu verras.
– Pas envie et puis ça ne sert à rien. Sûrement un truc de bonnes femmes superstitieuses.
– Commence au moins et après tu pourras juger. De toutes façons à ce stade tu n’as rien à perdre. »
Bon. Je commençai donc, avec pour motivation première d’avoir ensuite la satisfaction de lui donner tord (« Je te l’avais bien dit, ça ne sert à rien ! »). Malheureusement, comme souvent, je dus constater qu’il avait raison : ce livre était une bombe.
Un cours de créativité, censé réveiller l’artiste en chacun de nous. Dit comme ça, ça a l’air con.
J’ai toujours cru que j’étais dans l’incapacité d’écrire sur un sujet de mon choix. « De mon choix », quelle plaie ! Comment suis-je censée INVENTER un sujet ? Non, je ne suis créative que dans un cadre bien délimité. En osant m’ouvrir à la possibilité d’écrire sur ce qui me plaît, j’ai non seulement découvert que j’en étais capable, mais aussi que c’était bien plus amusant.
The Artist’s Way démonte une à une toutes nos idées reçues, bloqueuses de créativité.
Exemples :
Je suis nul. → Tout le monde est nul au début et on s’en fout !
Il faut s’adonner à des activités sérieuses et ensuite produire quelque chose de sérieusement bien. → Jouez, amusez-vous, faites n’importe quoi, dans la créativité comme ailleurs. Le génie de la créativité vient de cette capacité à innover et ne pas se tenir à des règles préconçues.
Il faut que ce que je produise soit de bonne qualité, sinon ça ne vaut pas la peine.
→ La créativité vaut le coup en tant que telle. C’est en y prenant plaisir et en pratiquant que l’on devient meilleur.
Je n’arriverai jamais à être chanteur et gagner ma vie avec, donc ça ne sert à rien de chanter. → Tu aimes chanter ? Chante et on verra par la suite. C’est toujours mieux que de ne pas chanter du tout.
Il y en a des tas d’autres, je ne vais pas faire le tour.
The Artist’s Way repose sur plusieurs principes fondateurs à répéter au cours des 12 semaines que dure le cours + des exercices de créativité à accomplir chaque semaine. C’est un vrai programme mais on n’est pas obligé de tout faire. On fait ce qu’on peut.
Principe n°1 : les morning pages
Tous les matins, on écrit trois pages. Juste ce qui nous passe par la tête, pas de stylisation quelconque. Le but étant de se vider des pensées qui tournent en rond, d’apprendre à mieux se connaître, de prendre conscience de certains problèmes récurrents (ex : au bout de 15 jours où j’écrivais tous les jours « je veux écrire quotidiennement », j’ai fini par me dire qu’il serait temps de faire quelque chose. Très efficace.), et parfois,de trouver des solutions. Bizarrement, on est plus sage sur papier.
Trois pages, tous les jours, non négociables. Au début, je détestais ça, ça me paraissait débile et inutile. Quand j’ai compris leur force, ça a changé. Il ne s’agit pas de se forcer à retenir et noter chaque pensée (ennuyeux), mais d’écrire ce qui nous préoccupe réellement et de suivre cette réflexion. Nuance.
Principe n°2 : le rendez-vous artistique
Une fois par semaine, on prévoit une activité, pendant environ deux heures, pour faire quelque chose d’amusant. Ça peut être n’importe quoi. Inutile de se forcer à aller voir la dernière expo à la mode si vous détestez l’art contemporain. Ça doit être kiffant. Même si c’est débile, on s’en fout, ça doit susciter votre enthousiasme.
Amatrice de films d’auteur, je suis allée au ciné voir « How to be single », parce que ça avait l’air amusant. On peut aussi faire une balade à vélo, un soufflé, aller à un club de jazz, à la piscine, chez la manucure, aller voir l’expo « Barbie » au musée de la mode, visiter une autre ville…
Seule condition : il faut faire l’activité seul(e).
L’objectif va être de réapprendre à s’amuser (et en effet, cet exercice ce révèle extrêmement difficile pour la plupart des créatifs bloqués). Ça permet à l’inspiration de venir.
Les exercices
Chaque semaine, on lit un chapitre du livre. À la fin, il y a des exercices en fonction du thème du chapitre.
Exemples :
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Choisissez 5 vies imaginaires que vous auriez aimé vivre. Réalisez-en un aspect cette semaine. Si votre rêve est d’être cow-boy, allez faire un tour à cheval.
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Découper dans des magazines des images qui correspondent à nos rêves et les coller ensemble sur une affiche. Ce sera la « Dream map »
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Offrez-vous quelque chose de joli pour la déco de votre chambre.
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Jetez une tenue qui représente le manque de confiance en soi.
Pour moi, c’était un pantalon noir classique et peu seyant, que je gardais pour être décente aux entretiens d’embauche. Quelle idée ! Fait curieux, le jour où je l’ai troqué contre la jupe dans laquelle je me sens sexy, j’ai effectivement été embauchée.
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Cueillez cinq jolies fleurs.
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Rendez-vous dans un « lieu sacré » (église, synagogue, mosquée, librairie, horlogerie…)
Un jour, alors que j’étais à un fabuleux concert de jazz (au O’Sullivans à Paris), le chanteur est venu nous parler, et très vite, il s’est avéré que lui aussi avait suivi le cours et que le sax du groupe écrivait encore ses morning pages tous les matins.
Dans The Artist’s Way, on appelle ça la « synchronicité » = un événement fortuit, arrivé comme par hasard mais qui, curieusement, nous aide dans notre chemin créatif.
Théorie : ce n’est pas un hasard, mais les forces de l’Univers qui nous aident dans notre projet. Je prenais ça pour des salades mystiques jusqu’à ce que je les observe moi-même. Depuis, la tante ésotérique, c’est moi. Vous êtes libre d’y croire ou pas.
Les gens que j’ai rencontré ayant fait ce cours ont dit leur vie transformée après. Je n’en suis pas là, mais je dirais que le livre a transformé ma vision de la créativité et donné beaucoup plus de couleurs à ma vie, avec des choses pourtant simples. Ma créativité ne coule pas encore à gros torrents tumultueux, mais elle est beaucoup plus libre et présente qu’avant, si bien que j’en parle à toute personne que je rencontre.
Bien que j’aie arrêté le cours, j’écris encore et toujours les « morning pages » tous les matins dans le S-Bahn. Pas parce que je me sens obligée, mais parce que ça m’aide énormément à savoir ce que je veux et l’obtenir.
Bref, de sceptique je suis passée à véritable adepte de ce bouquin ! Tout le monde devrait reprendre contact avec sa créativité, que l’on ait des ambitions artistiques ou pas. Quand on s’ouvre à cette possibilité, la vie prend des couleurs inattendues et se remplit d’une joie enfantine, celle qu’on a pu perdre à force d’être réaliste et sérieux.
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