Dimanche soir de la Saint-Valentin, nous jouons au couple conformiste et bravons les « Minusgrade » (belle expression allemande signifiant « les degrés en-dessous de zéro ») pour un dîner chez : Viasko. Toutes les excuses sont bonnes pour tester un nouveau resto.
Le local ressemble un peu à une « Kneipe » traditionnelle (= bistrot à l’allemande).
Tout juste entrés, nous demandons, avides, où se situe la « Kuchenvitrine » (vitrine dans laquelle les allemands exhibent leurs gros gâteaux), quand la serveuse nous interrompt, un peu énervée : « Vous n’avez pas vu le panneau ? Il est interdit d’entrer ici avec de la fourrure ! Vraie ou fausse, pas de discussion ! »
Non, nous n’avons pas vu le panneau. Je découvre qu’il est possible d’ôter le col fausse fourrure de ma parka et m’empresse de le faire, mais il y a dorénavant comme un froid. L’agressivité que j’ai ressentie à mon égard me met mal à l’aise.
Me prend-elle pour une personne mauvaise ? Croit-elle que j’ai sciemment nié l’existence du panneau ? Suis-je amorale de me pointer à un resto vegan avec un col imitation fourrure ? Pourquoi les sacs en vrai cuir, eux, sont-ils tolérés ? Ai-je vraiment envie de rester dans un local où on me considère comme une personne au sens éthique peu développé ?
Nous sommes donc ressortis – en partie parce qu’il n’y avait pas de « Kuchenvitrine ».
Mais, avant de partir, nous demandons au patron pourquoi il a imposé cette règle.
« Tous les jours, je vois des gens porter de la fourrure et ça me met en colère. Partout en société, je dois tolérer cette horreur et m’adapter. Alors au moins, pas chez moi, pas dans mon resto. En plus, mes clients n’ont aucune envie de manger avec une carcasse à la table d’à côté. Ça les dégoûte et ils sont contents de pouvoir dîner tranquilles, ici au moins. »
Mais pourquoi interdire également la fausse fourrure ?
« Premièrement, de nos jours, il est difficile de faire la différence entre vraie et fausse fourrure. Certaines pièces sont vendues comme fausses, alors que c’est de la vraie.
Deuxièmement, certains clients prétendent que leur manteau est en fourrure synthétique, alors que le contraire saute aux yeux. Je préfère faire l’économie de ces débats. »
Pour le patron, ce restaurant est plus qu’un local servant de la nourriture végane. C’est une utopie à sa taille. Un lieu où il peut créer le microcosme d’un monde meilleur.
MAIS : Est-ce vraiment la meilleure manière de procéder ?
(La suite au prochain article)
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